lundi 28 novembre 2011

Le livre n'est pas une marchandise comme les autres


Les librairies indépendantes de France sont la toute dernière chaîne du livre. Ces
libraires savent ce qui leur doit la vie : la loi Lang créée il y-a 30 ans et qui fixe le prix
du livre. Sans ce combat acharné qui a aboutit il y-a 30 ans il n’y aurait certainement
plus que mais des supermarchés du livre tenu par de grands groupes financiers.
Lors des rencontres nationales de la librairie en début d’année notre ministre de la
culture et de la communication le reconnaissait et prenait une prise de position très
nette en faveur de la librairie indépendante dont la baisse sévère des marges
commerciales met, déjà, en danger toute la chaîne du livre. La librairie est en effet le
commerce de détail le plus fragile économiquement. Sa rentabilité moyenne (résultat
net après impôt ou bénéfice) est de 0,3 % de son chiffre d’affaires (étude du Cabinet
Xerfi pour le ministère de la culture et de la communication et le Syndicat de la
librairie française – mai 2011). Malgré cela le gouvernement Fillon souhaite
rehausser la TVA pour le livre de 5,5 % à 7 % au 1er janvier 2012. L'effort de solidarité
nationale demandé à la chaîne du livre, estimé à une soixantaine de millions d'euros,
nous semble sans commune mesure avec la situation actuelle du marché du livre et
avec l'enjeu de la diversité, de la démocratisation culturelle et des actions
d’éducation populaire qu’exercent les librairies. Si cette mesure amène à fixer un
taux en France comparable à celui de l'Allemagne, rappelons que ce taux n'est que
de 4% en Espagne, de 3% au Luxembourg et de 0% au Royaume-Uni et en Irlande.
A l'échelle mondiale, on compte au moins 21 pays où le livre fait même l'objet d'une
exemption fiscale ou d'un taux zéro (Enquête 2011 de Price Waterhouse
Cooper pour l'Union Internationale des Editeurs). Les conséquences peuvent êtres
catastrophiques : en absorbant sur leur marge la hausse de la TVA – ce qui est un
risque très réel sur les millions de livres qu’ils ont en stock – les libraires diminueront
de fait la valeur de leur stock de 1,5 % faisant passer leur bénéfice de 0,3 % du CA
en moyenne à – 0,2 % ! Une majorité de ceux ci se retrouveront ainsi en perte et
menacées de fermeture. Sans aucune concertation avec les acteurs de la filière,
cette déçision brutale de la hausse de la TVA fragilisera, de fait, l’ensemble d’une
filière, en risquant d’entraîner la fermeture de centaines de librairies et en détruisant
de très nombreux emplois. La forte émotion ressentis par les représentants de tous
les professionnels suite à cette annonce et le sentiment de maltraitance à un des
éléments de notre démocratie qu'est le livre est à la hauteur de l’exaspération des
élus régionaux que nous sommes qui travaillons à soutenir ces commerces
d’intelligences.

Yannik Bigouin, conseiller régional,
Président de l’Etablissement Public de Coopération Culturelle « Livre et lecture en
Bretagne »
Jean Michel Le Boulanger, Vice-président à la culture et aux pratiques culturelles

Aucun commentaire: